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Lettre à ma mère

Livre d'artiste, installation participative et performance dans l'espace public

ARTCH, marché de l'art émergeant

Du 12 au 15 septembre 2019

Square Dorchester, Montréal, Qc

Lettre à ma mère

Installation participative et performance dans l'espace public

32 heures 

J’ai reçu des lettres de ma mère l’an dernier. Elles sont toutes cachetées avec un autocollant de fleurs scintillantes, mi-candides, mi-jolies. Une à une, dès que j’en recevais par la poste, elles terminaient leur course sur ma table de nuit, puis sur mon bureau. Après quelque temps, je les ai mises de côté dans le premier tiroir. Je n’étais pas prête. Les jours filaient, je me refusais à en découvrir le contenu. Ma mère habite la ville d’à côté, on se parle toutes les semaines. C’était devenu difficile d’admettre que je repoussais son geste. Elle me posait la question, je me défilais prétendant ne pas avoir trouvé le bon moment. Je percevais sa déception. Ma mère ne parle pas beaucoup, mais elle m’avait écrit. Pour moi, c’était devenu tabou, comme un secret de famille. Quelque chose de grave que j’allais apprendre. Enfin, la curiosité forgée par culpabilité me fit lire ces lettres. Elles portaient le poids lourd de ma non-réponse. Ma mère les avait rédigées à la pointe d’un stylo bille bleu sur un papier à lettres à fond de ciel nuageux. Les mots alignaient la tendresse avec soin. Elle couchait le passé d’un ton un peu triste de ne pas avoir assez vécu. Aujourd’hui, je consacre mon temps à lui répondre. J’ai envie qu’on soit plus près, elle et moi.

 

À l'automne 2019, J’offrais, à mes côtés, un espace de rédaction au coeur du Square Dorchester. Mon bureau est celui des passants, la papeterie se retrouvait dans le premier tiroir. Entre nous se trouverait un petit livre d’amour, à l’intérieur, je poème et trace ma mère.

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Lettre à ma mère, livre d'artiste

Dessins numériques imprimés à jet d'encre sur organza et reliure bradel

17 cm X 22 cm

 

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Ma mère hiver est une femme qui n’a pas de pays.

Elle tombe à la durée du jour

s’affole que la vie s’effrite

devant elle.

 

Elle marche sa quête d’un ailleurs en soi.

Pieds nus

les cailloux se glissent entre ses orteils

Elle repère le point du ciel qui fond dans la mer

S’y accroche

Son visage est un terrain mouvant.

 

Noire de bleuet pourtant

Ma mère lunaire ne choisit pas le noir ou le blanc.

Elle désigne le gris

Celui tout doux avec des petits poils couchés du vent.

 

Je suis une enfant de saison balayée par le temps.

Réveillée à un âge auquel mes plantes vont bien

et que le chat n’est pas mort par ma faute.

 

J’ai dit souvent que ma mère amère préférait l’ennui

Au lieu des utopies

Mes mots me mentent

La salissent

 

Mon corps cru mêle les regrets de l’hiver.

Je n’ai pas pensé que ma mère contenait un potentiel révolutionnaire.

Un feu de femme ne meurt jamais.

 

Au goût du jour

J’apprends à la lire

Une fois semaine

Je défroisse les poèmes de ses pensées

Une mère dictionnaire se laisse découvrir

tendrement

 

Je nous sens famille maison

Jouant aux grandes filles dans les règles du quotidien.

 

Ensembles, elles marchent, elles cœur, elles bouillent.

Elles crient et squinnent comme des hyènes polies

Mère et fille habitent leurs corps

Enfin

Secrètement solidaire

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